Dépistage de la surdité néonatale
Surdité
L’origine de la surdité néonatale est dans 30 à 50 % des cas génétique, 25 % prénatale/périnatale/post-natale et 30 à 40 % inconnue. Dans 90 % des cas les deux parents ne présentent pas de déficit de l’audition.
En 2000, le Joint Committee of Infant Hearing (JCIH) a proposé une liste des indicateurs de risque accru de surdité néonatale :
- infections maternofoetales connues comme pouvant entrainer une surdité
- anomalies crânio-faciales
- poids de naissance inférieur à 1,5 kg
- médicaments ototoxiques
- méningite bactérienne ou virale postnatale
- âge gestationnel <36 semaines, maladies ou conditions requérant un séjour de 48 heures ou plus dans une unité de soins intensifs néonataux (USIN)
- antécédents familiaux de surdité héréditaire
- consanguinité au 1er degrés
- présence de signes cliniques associés à un syndrome connu comportant une surdité (syndrome de Usher)
Selon le JCIH, la prévalence de la déficience auditive chez les nourrissons présentant des facteurs de risque pour des troubles de l’audition est environ dix fois plus élevée et différents facteurs de risque affectent l’audition à différents niveaux (l’intensité de la déficience auditive, le caractère bilatéral ou unilatéral de l’atteinte). En extrapolant les données de la littérature internationale, la HAS estimait la prévalence en France de la SPBN moyenne à totale en 2007 à au moins 1 pour 1 000 naissances (soit près de 800 nouveau-nés/an porteurs d’un déficit bilatéral auditif supérieur ou égal à 40 dB).
Historique du programme de dépistage en France
Recommandation de santé publique de la HAS (2007)
L’évaluation de la HAS avait conduit à recommander en 2007 le dépistage systématique avant la sortie de la maternité, pour repérer des enfants présentant un trouble auditif important le plus précocement (au cours des 3 premiers mois de la vie), permettre une prise en charge (suivi clinique, prothèses auditives, implants auditifs, implants cochléaires) avant la première année de vie (au moment où la plasticité cérébrale est la plus développée), et ainsi favoriser le bon développement du bébé puis de l’enfant. Toutefois, la faible qualité méthodologique de la littérature disponible n’avait pas permis de définir avec précision les modalités de dépistage ayant un impact démontré sur l’acquisition du langage et les capacités de communication au long cours de l’enfant.
Avis du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) (2007)
Le comité rappelait en 2007 que l’intérêt du dépistage et de ses conséquences n’a de sens que si des mesures efficaces de suivi médical et psychologique des enfants sourds sont prises pour les accompagner. Ainsi, il est important, au moment et au lieu où le dépistage est organisé, de recenser et d’y impliquer les structures d’aval qui assureront la prise en charge, en particulier les centres médicosociaux.
Expérimentations du programme de dépistage néonatal universel (2005-2007, 2010)
Les résultats des expérimentations testant la faisabilité du dépistage sur le territoire français (évaluation des prérequis de mise en œuvre et d’accessibilité entre 2005 et 2007 dans quelques régions françaises) publiés en 2010 par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS), étaient en faveur de la généralisation de ce dépistage.
Arrêtés ministériels encadrant le programme national de dépistage et sa mise en œuvre (2012, 2014)
Le dépistage de la SPBN a été mis en œuvre dès 2012 dans le cadre d’un programme national de dépistage visant à le rendre accessible à tous. L’objectif de ce dépistage était de détecter chez le nouveau-né un trouble auditif important au cours des 3 premiers mois de vie et de définir le traitement initial (suivi clinique, prothèses auditives, implants auditifs, implants cochléaires) avant la fin de la première année de vie. Le cahier des charges national définissant l’organisation du dépistage, qui devenait régional, et l’utilisation possible de deux techniques fiables de dépistage (oto-émissions acoustiques automatisées (OEAA) et potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) a été publié en 2014 par arrêté ministérielle du 3 novembre 2014.
Modalités du dépistage
La procédure du dépistage SPBN se décline en deux phases, d’après le cahier des charges du dépistage :
‒ 1ère phase de dépistage de la surdité, consistant à la vérification de l’audition : avant la sortie de la maternité, réalisation d’un premier test initial (T1) chez tous les nouveau-nés ; en cas de doute sur l’audition de l’enfant, d’un test de confirmation (T2), pratiqué dans les 48 heures et généralement avec les mêmes appareils d’audition que ceux utilisés lors du T1.
‒ 2ème phase de diagnostic de la surdité : Pour les enfants suspects de SPBN (tests auditifs T1/T2/T3 positifs ou non concluant), une consultation de diagnostic est proposée dans les mois qui suivent après la sortie de maternité dans un établissement de santé, en cabinet privé ou dans des établissements spécialisés en vue de poser ou non le diagnostic d’une surdité et d’en préciser le type (perception, transmission), la nature (bilatérale ou unilatérale) et la sévérité (surdité légère à totale). Elle ne donne pas lieu à une participation financière des familles.
Tests auditifs de dépistage
En maternité, les tests de dépistage de la SPBN n’ont pas pour rôle d’estimer la sévérité ou le type de déficience auditive mais d’identifier les nouveau-nés qui nécessitent une consultation spécialisée en audiologie infantile, reposant en 2022 sur deux techniques non invasives et bien acceptées par la population cible :
‒ Les oto-émissions acoustiques automatisées (OEAA) : test acoustique (qui désignent des sons de faible intensité produits par l’oreille interne en réponse à une stimulation auditive, recueillis dans le conduit auditif externe à l’aide d’un microphone miniaturisé).
‒ Les potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) : test électrophysiologique explorant l’oreille externe et moyenne, le nerf auditif et des voies nerveuses auditives du tronc cérébral (réalisé grâce à un casque muni de petites électrodes de surface). Ce test permet de dépister les surdités par atteinte des cellules ciliées internes, du nerf auditif ou des voies auditives du tronc cérébral. Chez les nouveau-nés dans les services de néonatalogie et de réanimation, les surdités par atteinte des voies auditives sont beaucoup plus fréquentes que dans la population générale des nouveau-nés (respectivement, 10 % vs. 1 % des surdités dépistées). Les PEAA ont l’avantage de pouvoir détecter les surdités en rapport avec une neuropathie auditive.
Les examens de diagnostic comprennent un examen clinique (recherche de signes de surdité syndromique), un examen des tympans sous microscope, un enregistrement des différents tests (OEAA, PEAA, des ASSR (auditory steady-state responses)), une impédancemétrie des tympans, et une audiométrie comportementale.
Saisine de la HAS
En décembre 2022, la DGS a saisi la Haute Autorité de Santé (HAS) sur « la réorganisation du programme national de dépistage de la surdité permanente néonatale ». Le programme national universel de ce dépistage néonatal a été mis en place en 2012, en vue de détecter dès la naissance chez les nouveaux nés la surdité permanente bilatérale néonatale (SPBN) (avec un seuil auditif >40 dB quelle qu’en soit l’étiologie). Ce dépistage a pour objectif de diminuer l’âge au diagnostic pour permettre une prise en charge précoce, conformément aux recommandations de janvier 2007 de la HAS « Evaluation du dépistage néonatal systématique de la SPBN ».
Un premier bilan de ce programme, publié en 2019 par Santé publique France (SpF) indiquait une grande hétérogénéité des pratiques professionnelles selon les régions à toutes les étapes du programme, ne garantissant pas une égalité d’offre de soin des enfants selon les territoires. Dans cette perspective, la saisine a pour objectif d’évaluer ce programme de dépistage en vue de proposer des actions pour améliorer l’effectivité du programme national de dépistage de la surdité permanente néonatale et ainsi d’homogénéiser ses pratiques et son organisation en l’intégrant dans le processus du programme de dépistage nationale néonatale des autres maladies.
Voir également :
Surdité néonatale : mesure exploratoire par le PMSI de la couverture du dépistage en Île-de-France : https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2019-3-page-427.htm
Réflexion autour du dépistage précoce de la surdité au regard de la théorie de l’attachement : https://www.cairn.info/revue-dialogue-2007-1-page-41.htm
La surdité permanente de l’enfant relève-t-elle du dépistage néonatal ? https://www.cairn.info/revue-pratiques-et-organisation-des-soins-2009-3-page-207.htm
Dépistage systématique de la surdité du nouveau-né : mesure de la satisfaction des mères dans des maternités des Pays de la Loire en 2015 : https://www.cairn.info/revue-perinatalite-2020-3-page-124.htm
Dépistage positif de la surdité néonatale permanente et profil interactif des dyades mère-enfant : https://www.cairn.info/enfant-en-developpement-famille-et-handicaps–9782749206837-page-157.htm