Sociologie du monde des sourds. Thèses
Les thèses de doctorat sur le monde des sourds sont très nombreuses et variées. Quelques exemples…
Andrea Benvenuto, Qu’est-ce qu’un sourd ? : de la figure au sujet philosophique
Thèse de doctorat en Philosophie. Soutenue en 2009 à Paris 8
Résumé : Du paradigme aristotélicien, qui pose la parole articulée comme distinction entre l’homme et l’animal, aux controverses entre rationalistes et sensualistes au XVIIIe siècle, le sourd-muet des philosophes a diversement inspiré les pédagogues de sourds jusqu’à l’abbé de l’Épée. La perspective aristotélicienne subit un renversement au siècle des Lumières. En témoigne la « Lettre sur les sourds et muets » de Diderot : le recours à la langue des sourds subvertit l’ordre qui contraint l’homme à un rapport prédéterminé au monde de la connaissance. Depuis la Révolution française, l’éducation des sourds, affaire publique, concerne une communauté de citoyens. Tout au long du XIXe siècle, la médecine de l’oreille se développe sur le terrain de l’enseignement des sourds et de moyen, la parole devient une fin. Figure philosophique, le sourd se mue en analyseur anthropologique définissant les contours de l’humain en termes de normal et de pathologique. C’est dans un rapport à un milieu de vie (Canguilhem) que la surdité se construit comme anormalité et pathologie à soigner, et comme différence culturelle et linguistique. Avec le sociologue Bernard Mottez, le concept de rapport devient central : la surdité est une expérience partagée. Sur le plan philosophique, ce concept dénoue les liens de causalité entre surdité et ordre social et crée une indétermination d’où émerge le sujet sourd. Par la confrontation du sujet sourd au « Maître ignorant » (Rancière), le concept de rapport déplace la question de l’inclusion des sourds par la langue dans la communauté des citoyens vers celle de l’inclusion irréductible des êtres humains, sourds ou entendants, dans la communauté des égaux.
https://www.theses.fr/2009PA083128
Sophie Bergheimer, Les sujets sourds face à l’implant cochléaire : l’épreuve du moi-corps-sourd.Idéal de la réparation et conflit(s) narcissique(s)
Thèse de doctorat en Psychanalyse et psychopathologie. Soutenue le 17-12-2021 à l’Université Paris Cité
Résumé : Penser l’existence des sourd·e·s comme sujets conduit à un bouleversement des axiomes de l’appareil de la psychopathologie psychanalytique appuyés sur les faits et effets de la langue sonore. Dès lors, écouter ces sujets amène à travailler les thèmes du corps, du langage, de la langue et du lien aux autres. Cette étude est partie d’un constat : certains sujets sourds souhaitent rester sourds et ceci malgré la présence de l’implant cochléaire, considéré comme objet de réparation, qui offrirait une voie d’accès aux sonorités normalisantes. Ne pas entendre ces sons voudrait-il dire ne pas être affecté·e par le langage et l’autre, et ainsi ne pas se constituer en tant que sujet (alors que pour la psychanalyse, le sujet pulsionnel, par l’acte de parole, peut faire émerger sa dimension inconsciente) ? Comment comprendre ce refus de l’implant cochléaire qui, dans une première lecture, peut être compris comme résistance à l’inscription dans le lien social ordinaire et à une présence sonore dans le corps ? Autrement dit, quels sont les enjeux inconscients du refus de l’implant cochléaire chez les sujets sourds ? Que peut-il nous apprendre dans le travail de l’écoute et dans nos conceptions de ce qui fait sujet ? Pour répondre à ces questions, nous avons mis en place une méthodologie entre-deux – construction clinique et théorisation ancrée – qui s’est révélée être à l’image d’un des aspects du symptôme des sujets sourds face à cette démarche discursive et performative de la réparation. Les sujets sourds se retrouvent face à un conflit entre le moi-corps-sourd – témoignant de la participation de la surdité au montage du circuit pulsionnel et à l’entrée en relation avec les autres – et l’idéal du moi – qui est formé, entre autre, à partir du discours et des pratiques sociales de réparation. Notre réflexion sur la constitution subjective des êtres nés sourds et sur la place de la réparation de la surdité (d’autant plus idéalisée depuis l’existence de l’implant cochléaire) pour la société et pour les parents – majoritairement entendants -, permet de saisir le(s) conflit(s) narcissique(s) en agir. Néanmoins, la communauté Sourde tient un discours au sujet de l’être s/Sourd·e, de sa langue et de sa culture, et a des revendications vis-à-vis de la société Entendante. Par ce biais, elle rend possible le déplacement du rapport subjectif à la réparation. La communauté Sourde est un lieu de récupération de la résistance inconsciente individuelle, l’inscrivant dans une résistance collective et une lutte politique.
https://www.theses.fr/2021UNIP7148
Alix Bernard, Recherche autour d’un dialogue de sourds : étude et analyse du conflit des représentations que se font les professionnels entendants au sujet des enfants sourds
Thèse de doctorat en Psychologie. Soutenue en 1995 à Paris 7
Résumé : M’interrogeant sur la récurrence du conflit historique entre « oralistes » et « partisans de la langue des signes » j’ai été amenée a considérer ce conflit comme idéologique, fonctionnant plus particulièrement comme appareil réducteur des angoisses. J’ai été conduite alors à étudier comment les professionnels travaillant avec les enfants sourds étaient touches (angoisses, affectes), consciemment et inconsciemment, par les enfants sourds. Il est apparu qu’au travers des modalités relationnelles qu’elle induit, la surdité contribuait a réactiver le fantasme de séduction (les gestes « sursexualisant » fantasmatiquement la relation) et à inhiber les processus de pensée. Il est apparu également que le nombre des positions des professionnels étaient adoptées pour éviter une expérience extrêmement perturbante, que j’ai appelée l' »effet d’écho ». Du au non-partage des voix, l’effet d’écho rend le professionnel seul face a sa propre voix et sa propre image; il entraine une chute du symbolique et un envahissement par l’imaginaire.
https://www.theses.fr/1995PA070139
Sophie Dalle, Chercheurs, sourds et langage des signes : le travail d’un objet et de repères linguistiques : en France du 17e au 21e siècle
Thèse de doctorat en Sociologie. Soutenue en 2006 à Toulouse 2
Résumé : Cette recherche porte sur les conditions d’existence d’études linguistiques sur des langues en gestes. Les efforts d’inscription des modes de communication humaine se concentrent, à la fin du 19ème siècle, autour de langues vocales. Nous montrons ainsi que différentes voies d’insertion des langues gestuelles dans la linguistique moderne sont empruntées dans plusieurs pays. Nous étudions alors les conditions de certification à l’intérieur d’un réseau de recherche international sur cet objet. Une réflexion sur les modalités de collaboration entre sourds et scientifiques constitue la trame de cette recherche. Elle permet de questionner les formes d’existence collective des uns et des autres, et la nature de leur rapport, dans différents contextes socio-historiques. C’est à l’intérieur de ce cadre d’analyse que sont décrites les formes de construction, de présence, ou de négociation, des repères de l’Anthropologie au 19ème siècle, et de la Linguistique Générale au 20ème et 21ème siècle.
https://www.theses.fr/2006TOU20055
Élisabeth Dambiel-Birepinte, Du tutorat pour enfants sourds : apport pédagogique du tuteur selon son degré de surdité
Thèse de doctorat en Sciences de l’éducation. Soutenue en 2003 à Bordeaux 2
Résumé : Tutorat et surdité sont ici associés. Une 1ère partie retrace les étapes du tutorat avant de le définir et de poser son cadre scientifique de référence. Celui-ci requiert l’approche psychosociale et notamment celle de Moscovici, la contribution de Piaget et de Vygotski pour la psychologie du développement cognitif. À partir de ces courants se dégage celui de la psychologie sociale génétique avec l’approche socio-cognitive : les interactions sociales sont considérées selon un parcours développemental pour les interactants. Ensuite, le handicap de surdité est présenté avec entre autres, les difficultés qu’il souligne dans les approches éducatives. C’est pourquoi notre recherche s’appuie sur des interactions de tutelle auprès de tutorés sourds. Les tuteurs sont sourds, demi-sourds ou entendants. Une approche d’une part quantitative fait apparaître que le tutorat permet de faire progresser les tutorés sourds. Cependant l’approche qualitative des interactions ne nous permet pas d’isoler de manière précise un élément de la communication qui serait à l’œuvre dans ce processus de progression. Cependant, l’effet de la variable « communication » est positif sur les progrès des tutorés. L’observation qualitative fait en outre ressortir des constantes comportementales dans la relation intradyadique comme la construction d’un espace de communication. Il semblerait également que des facteurs motivationnels soient à l’œuvre et fassent primer les effets relationnels.
https://www.theses.fr/2003BOR21013
Hélène Delage, Évolution de l’hétérogénéité linguistique chez les enfants sourds moyens et légers : étude de la complexité morphosyntaxique
Thèse de doctorat en Lettres et Linguistique. Soutenue le 06-12-2008 à Tours
Résumé : Les répercussions linguistiques d’une surdité moyenne ou légère congénitale sont encore peu connues. La littérature s’accorde cependant sur un point : la grande variabilité inter-individuelle des profils linguistiques. Cette thèse explore l’hétérogénéité de ces profils en identifiant la prévalence, la nature, la sévérité et l’évolution des troubles du développement du langage dans une population de 32 participants sourds légers et moyens âgés de 6 à 13 ans. Les résultats indiquent que la variabilité inter-sujets des performances langagières s’avère liée en partie au degré de perte auditive. Par ailleurs, une réduction de cette variabilité est observée dans l’évolution de la complexité morphosyntaxique. Cette évolution favorable ne permet cependant pas aux sourds moyens et légers de rattraper le niveau des normo-entendants. Une explication pour cet arrêt dans la progression du langage est avancée, qui fait appel à la maturation tardive et incomplète des systèmes de performance.
https://www.theses.fr/2008TOUR2006
Tamara Dmitrieva, Des dispositifs aux expériences du grandir sourd.e. : contribution à une sociologie du monde de l’enfance sourde
Thèse de doctorat en Sociologie. Soutenue le 09-12-2022 à Paris, EHESS
Résumé : Cette thèse se situe au croisement de trois champs de recherche – surdité, handicap et enfance. Elle propose une contribution à une sociologie du monde de l’enfance sourde, en s’appuyant sur l’enquête multi-située et en donnant la parole à ses différents acteurs, impliqués à titre existentiel (enfant et sa famille) ou professionnel (différents professionnels de la surdité). La lecture de l’évolution de la catégorie des enfants sourds dès XVIIIe siècle met en lumières les différentes figures socio-historiques dont héritent les tensions qui perdurent dans le monde de l’enfance sourde aujourd’hui. Ce travail permet de mettre en lumière des enjeux multiples dans lesquels sont pris les enfants sourds et leurs familles, confrontés aux discours souvent contradictoires, incarnés dans les dispositifs techniques et institutionnels. L’analyse des parcours et des expériences du grandir sourd.e articulée à celle des dispositifs fait apparaître la complexité des situations vécues par les acteurs. En interrogeant comment la normalité peut y émerger, ce travail contribue également à la réflexion sur le vivre ensemble et la possibilité du monde commun.
https://www.theses.fr/2022EHES0141
Isabelle Estève, Approche bilingue et multimodale de l’oralité chez l’enfant sourd : outils d’analyses, socialisation, développement
Thèse de doctorat en Langage et surdité. Soutenue le 18-10-2011 à Grenoble
Résumé : L’objectif de cette thèse est la description de l’oralité de l’enfant sourd et de son développement à travers le prisme d’une double perspective : celle du bilinguisme et de la multimodalité. Cette double perspective permet d’envisager l’oralité dans toutes ses dimensions – vocales et gestuelles d’une part, verbales et non-verbales d’autre part – afin de rendre compte de la spécificité des dynamiques langagières intra- et inter-modalités impliquées dans le développement des compétences de symbolisations orales chez l’enfant sourd, locuteur bilingue bimodal (français/LSF) en devenir. L’étude s’appuie sur les productions langagières de 30 enfants scolarisés dans des structures différentes (oraliste, bilingue, « mixte »). Les réflexions sur les outils d’analyse développés pour appréhender, décrire et transcrire les pratiques des locuteurs sourds dans leurs aspects bilingues et multimodaux constituent le premier volet de notre travail. Le second volet s’attache à rendre compte de la place des langues et des modalités dans les parcours de socialisation langagière des enfants sourds en analysant les stratégies adaptatives mises en œuvre dans la diversité des interactions quotidiennes auxquelles ils sont confrontés dans l’espace scolaire, avec les enseignants ainsi qu’avec leurs pairs sourds ou entendants. Le troisième volet se centre plus particulièrement sur la manière dont les dimensions langagières et linguistiques de la bimodalité sont impliquées dans le développement des compétences orales – lexicales et narratives – des enfants sourds.
https://www.theses.fr/2011GRENL026
Grégory Goasmat, Langue des signes et malaise du sujet
Thèse de doctorat en Sciences du langage. Soutenue le 26-06-2017 à Rennes 2 , dans le cadre de École doctorale Sciences humaines et sociales (Rennes) , en partenariat avec Université Bretagne Loire (COMUE) et de Centre Interdisciplinaire d’Analyse des Processus Humains et Sociaux [Rennes]
Résumé : Le champ socio-professionnel circonscrit par la prise en compte éducative et sociale des surdités sévères et profondes congénitales est structuré par un clivage entre les courants gestualistes et oralistes apparu à la fin du XVIIIè siècle. Depuis la fin des années mille neuf-cent soixante-dix, sous les impulsions de la militance pour la « cause sourde » d’une part et des progrès technico-médicaux de l’autre, ce clivage s’est trouvé refondé dans celui distinguant une conception du sujet sourd, héritant du structuralisme en linguistique et en psychanalyse, d’une approche de l’individu déficient auditif marqué du positivisme des modèles biologiques appliqués à l’humain. Si l’indigence de la prise en compte de la complexité de la rationalité humaine par ce second paradigme fait l’objet de critiques tout aussi sévères qu’argumentées de la part du premier, la passion pour la langue des signes qui infiltre celui-ci l’inscrit aussi, par là même, dans la tendance sociale repérable comme celle d’un effacement de la spécificité de l’enfant. Bien au-delà d’ailleurs du contexte du handicap, on peut identifier que la langue des signes produit dans notre contemporanéité des effets de fascination amplement redevables aux échos qu’elle trouve dans la négativité – au sens de Jean Gagnepain – constitutive de la condition de l’Homme. Dans l’investissement de la langue des signes, ordonné par la militance pour la « cause sourde » et l’orientation se présentant comme œuvrant à un bilinguisme, la question de l’imprégnation de la langue audio-orale communautaire et de son outillage par l’écrit figure enfin un point d’achoppement dont se démarquent les approches oralistes notamment renouvelées par la Langue française Parlée Complétée (LPC).
https://www.theses.fr/2017REN20029
Héléne Hugounenq, Pratiques langagières des sourds et discours autour de la langue des signes : l’intégration en question
Thèse de doctorat en Ethnologie et anthropologie sociale. Soutenue en 2009 à Paris, EHESS
Résumé : Cette recherche est partie du questionnement suivant: pourquoi, alors que la langue des signes est aujourd’hui reconnue comme une langue à part entière, que de nombreux entendants l’apprennent, qu’elle est présente dans les médias et que des interprètes sont formés, reste-t-elle souvent perçue comme un frein à l’intégration des sourds dans la société française ? En déconstruisant les notions d’intégration et de langue, nous montrons, dans une observation des pratiques langagières quotidiennes des sourds pratiquant la langue des signes et des entendants amenés à les côtoyer, que les modalités de communication ne font pas qu’affecter les interactions mais touchent également à notre sentiment d’appartenance: à un pays pour la langue avec laquelle on parle, à une région pour l’accent que l’on possède, à une classe sociale pour le lexique qu’on utilise. En effet, la langue est souvent perçue comme ce qui lie, délimite un groupe humain, fonde une identité, et si les sourds pratiquent la langue des signes, alors ils sont catégorisés comme un groupe différent et hermétique à celui des locuteurs de la langue française, comme des individus posant un problème d’intégration. Pourtant, au terme de plusieurs années d’immersion auprès de la population sourde, il apparaît qu’en réalité, il n’est pas d’identité individuelle et de pratique langagière qui ne soient plurielles, et que cette pluralité n’est pas forcément vécue sur le mode du déchirement identitaire.
https://www.theses.fr/2009EHES0380
Rute Maria de Souza, La langue des signes française, à l’usage des sourds, dans les messages audiovisuels
Sociologie. Université Nancy 2, 1997
Résumé : Ce travail de recherche a été basé sur les rapports entre la langue des signes française, langue naturelle ou maternelle des sourds, et l’importance de cette même langue dans le support médiatique audiovisuel. Nous nous sommes intéressés aux processus de communication chez les sourds : leurs rapports sociaux, leurs différents types de langage et l’importance de la langue des signes française, cette dernière étant la méthode la plus efficace qui permet aux sourds une communication aisée, ainsi que l’apprentissage de la langue française orale et écrite. De même, nous avons étudié l’importance et l’influence des médias dans les sociétés modernes, la télévision étant le média qui touche le plus d’individus à travers le monde. Ainsi, nous constatons toutes les difficultés que rencontrent les sourds face au langage utilisé par la télévision française; les traductions en langue des signes et le sous-titrage étant les langages les plus adaptés à ce groupe social. Or, la télévision est un outil d’apprentissage de la langue chez les enfants, ainsi qu’un moyen d’identification social. De ce fait, nous comparons l’importance de la place faite à la langue des signes à la télévision française, avec différents pays, en nous basant sur les durées de transmissions hebdomadaires. Une présence plus importante de la langue des signes française dans les messages audiovisuels permettrait à l’enfant sourd d’apprendre, à l’adolescent de s’épanouir et à l’adulte de s’exprimer aisément.
https://hal.science/tel-01776494v1
Ornela Mato, Les professionnels entendants de la surdité : transformation des dynamiques professionnelles suite à l’émergence du nouveau paradigme de la surdité dans les années 1970
Thèse de doctorat en Sociologie. Soutenue le 08-12-2017 à Paris 8
Résumé : Le domaine propre aux interventions relatives à la surdité est fortement clivé par l’opposition entre deux paradigmes : l’un centré sur l’oralisation (réparation de l’ouïe et de la parole), l’autre sur la langue des signes depuis les années 1970 avec le Réveil Sourd (lutte pour la reconnaissance d’une communauté linguistique et culturelle). De nombreuses institutions et professionnels sont concernés (enseignants, éducateurs spécialisés, orthophonistes, audioprothésistes, codeurs en LPC, interfaces de communication…) pour différents secteurs d’activités (médical, para-médical, éducation, communication). Les interventions sont au départ le fait de professionnels entendants, mais le Réveil va légitimer la présence de sourds pratiquant la langue des signes. Les associations et l’engagement d’universitaires jouent un rôle central dans cette émergence.La reconfiguration des dynamiques professionnelles conduit ici à une redéfinition des rôles et des places des acteurs (professionnels entendants, secteur de l’éducation) : concurrences, reconnaissance des manières d’agir, émergence d’associations de parents et de sourds, rôle de l’expertise. Malgré des aspirations à une reconfiguration de l’action publique, un compromis inégal perpétue le modèle dominant tourné sur l’oralisation, assorti d’une reconnaissance partielle de la langue des signes et du développement des professions d’interprètes et d’enseignant en LSF.
https://www.theses.fr/2017PA080134
Saskia Mugnier, Surdités, plurilinguisme et Ecole : approches sociolinguistiques et sociodidactiques des bilinguismes d’enfants sourds de CE2
Thèse de doctorat en Sciences du langage. Soutenue en 2006 à Grenoble 3
Résumé : Nous abordons la question de l’éducation des enfants sourds à travers un ensemble de regards croisés. L’approche adoptée tout au long de cette recherche se situe au carrefour de la sociolinguistique et de la didactique du plurilinguisme et emprunte essentiellement aux derniers développements de ces deux disciplines tentant ainsi de renouveler le questionnement sur l’enfant sourd et ses langues. Dans un premier volet de la thèse, à travers une perspective sociolinguistique, il s’agit de prendre en compte : -les dimensions sociales et institutionnelles de la surdité afin de cerner diachroniquement et synchroniquement la place accordée à chacune des langues (français/LSF) dans la scolarisation des enfants sourds ; -les représentations sociales véhiculées par des discours d’enseignants travaillant avec des enfants sourds dans des classes spécialisées. Dans un second volet de cette recherche, la perspective est socio-didactique et présente une étude micro-sociolinguistique des interactions de classe qui explore plus particulièrement les jeux et les enjeux des langues et autres codes présents dans l’espace scolaire. La finalité de la recherche est double : faire avancer la connaissance d’une situation de bilinguisme particulière, et encore mal connue, et contribuer à proposer des pistes de réflexions ouvrant des perspectives dans l’intervention éducative auprès des enfants sourds.
https://www.theses.fr/2006GRE39033
Pauline Rannou, Sociolinguistique de la surdité, didactisation de la pluralité linguistique : parcours de parents entendants en France et regards croisés sur la scolarisation des élèves sourds : France – États-Unis
Thèse de doctorat en Sciences du langage. Soutenue le 20-09-2018 à Rennes 2
Résumé : Le dépistage néonatal de surdité rendu systématique en maternité depuis 2014 est venu modifier considérablement le diagnostic puis l’annonce aux parents. Cette recherche a pour objectif d’étudier les représentations et les parcours de parents entendants d’enfants sourds, à partir du dépistage de surdité, jusqu’au diagnostic, à l’annonce, puis aux « choix » de communication et de scolarisation. Un deuxième volet développe les programmes de scolarisation mis en place pour les enfants sourds en France, et particulièrement le Pôle d’éducation pour les jeunes sourds (PEJS), créés en 2017, qui viennent répondre au principe d’inclusion en milieu ordinaire, tout en offrant la possibilité d’une scolarisation en accord avec les choix linguistiques de la famille. Au total, soixante-et-un entretiens ont été menés. Pour moitié auprès de familles dont les enfants sourds ont aujourd’hui entre six et dix ans, et auprès de personnes sourdes adultes communiquant en langue des signes et à l’oral vocal. Ces différents témoignages croisés donnent à voir des expériences contrastées et nous ont amené à questionner les notions de handicap, d’identité, de langue et de culture. L’autre moitié concerne les responsables pédagogiques et enseignants d’établissements scolaires accueillant des élèves sourds en France et dans plusieurs états des États-Unis, d’est en ouest. Ces entretiens et observations ont apporté un regard complémentaire sur les pratiques didactiques à destination des élèves sourds et nous ont amené à proposer des pistes d’adaptations pédagogiques, décrites comme étant peu développées en France selon plusieurs enseignants interrogés.
https://www.theses.fr/2018REN20045
Alice Ratier, Les personnes sourdes face au droit : l’exemple de la détention
Thèse de doctorat en Droit public. Soutenue le 17-12-2019 à l’Université Clermont Auvergne
Résumé : En subissant un cumul de vulnérabilités, les personnes sourdes détenues nous invitent à examiner leur situation. Dans quelle mesure leur condition juridique tient compte de celle-ci ? Quelle régulation effective le droit public peut-il aménager à leur égard ? Insensibles aux bruits qui caractérisent le milieu carcéral, les personnes sourdes détenues sont malgré tout, sensibles au silence qui les concernent. Enfermé dans une conception médicale du handicap, le droit français ne peut pas entendre les besoins de ces personnes. Sourde à leurs sollicitations et aux obligations internationales qu’elle a acceptées, la France maintient ces personnes dans des conditions de détention inhumaines et dégradantes. L’isolement social qui en découle n’est que le reflet d’une société inaccessible à la surdité et le constat d’une absence de reconnaissance juridique effective.
https://www.theses.fr/2019CLFAD028
Anna Sargsyan-Sablong, D’une confrontation traumatisante à une rencontre libératrice : éducation non formelle et conditions d’une réciprocité relationnelle sourds-entendants
Thèse de doctorat en Sciences de l’éducation. Soutenue le 06-11-2014 à Strasbourg
Résumé : Cette thèse s’intéresse des relations interpersonnelles entre les sourds et les entendants, qui partagent de multiples frontières : spatiales, sociales, ou intersubjectives. L’incompatibilité communicationnelle entre eux envoie aux barrières relationnelles et interactionnelles, générant des rapports déséquilibrés entre la société dominante entendante et la minorité sourde. D’une part dans son espace social le sourd est confronté aux incapacités d’expression authentique freinant son affirmation identitaire et affectent son image sociale. D’autre part l’entendant est heurté à des blocages communicationnels qui rendent son parcours émotionnellement éprouvant. Questionnant cet éternel processus d’échec communicationnel, l’objectif de ce travail est de mieux réfléchir à un rapprochement possible des sujets sourds et entendants au-delà du partage des connaissances linguistiques, et cela par le biais de transformation de l’espace social en celui d’apprentissage. La recherche a été réalisée dans le cadre de l’éducation non formelle, en mettant en place une rencontre multiculturelle, qui a réuni en 2011 des jeunes sourds et entendants de 18 à 30 ans, provenant de France, d’Arménie, d’Allemagne et de Biélorussie. Utilisant des outils pédagogiques adaptés, les participants ont été invités à créer leurs propres modes de communication, essayant de dépasser les barrières linguistiques, mais aussi celles représentationnelles et personnelles pour surmonter les obstacles qui les différencient. La recherche a été focalisée particulièrement sur le parcours du sujet entendant. Les analyses ont permis de modéliser le parcours observé de l’entendant dans un espace d’apprentissage, avec une possible évolution du sens projetée vers une tri-dimension spatiale et temporelle, c’est-à-dire Eros (sensitif-affectif), Logos (socio-cognitif), et Muthos (ouverture vers une dynamique de questionnement.
https://www.theses.fr/2014STRAG028
Olivier Schetrit, La culture sourde : approche filmique de la création artistique et des enjeux identitaires des sourds en France et dans les réseaux transnationaux
Thèse de doctorat en Anthropologie sociale et ethnologie. Soutenue en 2016 à Paris, EHESS
Résumé : C’est Ferdinand Berthier (1803-1886), sourd très réputé au 19 ème siècle, qui, lors d’un banquet à Paris où il avait invité des sourds étrangers, annonça que la communication était possible grâce à la grammaire universelle de la langue des signes. Cette idée d’une communication transnationale des sourds ressurgit lors de la création en France d’IVT (International Visual Theatre) en 1976 dont l’un des objectifs était alors de développer l’activité culturelle sourde en échangeant sur le travail, les ateliers de théâtre et d’expression corporelle avec d’autres pays. La notion de communauté sourde semble actuellement connaître un changement d’échelle, les sourds étendant leurs « territoires locaux » (au niveau d’un groupe, d’une ville) et l’usage d’une langue de signes nationale, à une mise en réseau dans « un territoire mondialisé » où se pratique une langue des signes « internationale »; ce mouvement est favorisé par l’essor des nouveaux moyens de communication via l’internet, grâce aux webcams, messageries et services associés, tels les « centres relais » qui permettent l’intervention à distance d’interprètes filmés. La « mobilité » des personnes sourdes s’accroît dans une proportion qui n’avait encore jamais été observée dans l’histoire. Cette thèse analyse de manière réflexive, un corpus d’entretiens avec des sourds en France et dans des festivals internationaux de Sourds filmés par l’auteur, lui-même sourd de naissance et acteur d’IVT. Elle interroge aussi l’œuvre et la posture de nombreux artistes sourds de divers domaines qi explorent le concept de sourtitude ou surditude (Deaf hood en anglais) dans le sens d’une revendication positive (Deaf gain), où la déficience auditive se trouve valorisée comme source d’autres aptitudes – dont la langue des signes – qui sont partagées par ses acteurs comme une véritable culture en cours de création: les Sourds avec une majuscule désignant selon James Woodward (1978) l’appartenance à une communauté linguistique, sociale et culturelle.
https://www.theses.fr/2016EHES0732
Sabine Sevre, Les compétences sociales des enfants sourds-aveugles : influences de l’interlocuteur et du contexte sur les échanges interpersonnels
Thèse de doctorat en Psychologie. Soutenue en 1999 à Paris 5
Résumé : Cette recherche vise a comprendre comment les enfants sourds-aveugles de naissance sont étayés dans leur accès a la communication référentielle en observant la façon dont se structurent les interactions entre adulte et enfant sourd-aveugle en fonction de certains paramètres. Les paramètres susceptibles d’affecter la qualité de l’interaction et la mise en œuvre des compétences des sujets sont : le contexte (didactique, voue a la réalisation d’une tache vs. Social, dont le but est le maintien même de l’échange) ; le statut du partenaire adulte (familier vs. Non familier) et le niveau de développement social des sujets (évalué sur l’échelle de maturité sociale de Vineland ainsi que par l’observation directe de leurs niveaux de conduites). Une micro-analyse comportementale séquentielle a été réalisée à l’aide du logiciel thème de Magnusson (1996) a partir de 40 observations portant sur 10 dyades. Les résultats montrent que le contexte didactique influence non seulement les comportements émis et l’organisation interindividuelle de ceux-ci, c’est-a-dire les stratégies éducatives des adultes et la participation des enfants a l’interaction, mais surtout la qualité de leurs échanges, attestée par la coordination des comportements, la longueur des échanges et l’alternance des prises de tour. Si le statut du partenaire influence peu le déroulement des échanges, le contexte didactique, ou chacun a un rôle clairement défini, favorise nettement l’attention triadique sur l’objet réfèrent, aboutissant a une interaction organisée et de qualité; ceci est d’autant plus vrai que le niveau de développement social des sujets est plus élevé.