Surdité et expressions françaises

La surdité fait l’objet de diverses expressions en français…

Vocabulaire lié

dur de la feuille : https://fr.wiktionary.org/wiki/dur_de_la_feuille

bouché : https://fr.wiktionary.org/wiki/bouch%C3%A9

dur d’oreille : https://fr.wiktionary.org/wiki/dur_d%E2%80%99oreille

malentendant : https://fr.wiktionary.org/wiki/malentendant

sourdingue : https://fr.wiktionary.org/wiki/sourdingue

muet : https://fr.wiktionary.org/wiki/muet

sourd-muet : https://fr.wiktionary.org/wiki/sourd-muet

sourd-parlant : https://fr.wiktionary.org/wiki/sourd-parlant

Proverbe ou phrase toute faite

Pour faire bon ménage, il faut que l’homme soit sourd et la femme aveugle

Il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre

Il vaut mieux entendre ça que d’être sourd

A des oreilles sourdes, il n’est pas bon de prêcher

Il croit qu’il devient sourd parce qu’il n’entend plus parler de lui (Talleyrand)

Il m’est arrivé de prêter l’oreille à un sourd. Il n’entendait pas mieux (Raymond Devos)

La passion est sourde et muette de naissance (Honoré de Balzac)

Je connais des sourds qui s’entendent très bien (Philippe Geluck)

Les amateurs de musique ont ceci de pénible qu’ils nous demandent toujours d’être totalement muets au moment même où nous souhaiterions être absolument sourds (Oscar Wilde)

Nous sommes tous sourds quand cela arrange notre bonheur. Cela repose un peu de ne pas tout entendre (Tahar Ben Jelloun)

Le polytechnicien qui coupe les pattes d’une sauterelle, lui dit : « Saute ! », et ne la voit pas sauter, en conclut qu’elle est devenue sourde (Philippe Meyer)

Mot ou expression dérivée

à pas sourds : https://fr.wiktionary.org/wiki/%C3%A0_pas_sourds

faire la sourde oreille : https://fr.wiktionary.org/wiki/faire_la_sourde_oreille

dialogue de sourds : https://fr.wiktionary.org/wiki/dialogue_de_sourds

rester sourd : https://fr.wiktionary.org/wiki/rester_sourd

assourdir : https://fr.wiktionary.org/wiki/assourdir

assourdissant : https://fr.wiktionary.org/wiki/assourdissant

bécassine sourde : https://fr.wiktionary.org/wiki/b%C3%A9cassine_sourde

chambre sourde : https://fr.wiktionary.org/wiki/chambre_sourde

comme un sourd : https://fr.wiktionary.org/wiki/comme_un_sourd

consonne sourde : https://fr.wiktionary.org/wiki/consonne_sourde

lanterne sourde : https://fr.wiktionary.org/wiki/lanterne_sourde

sourd comme un pot : https://fr.wiktionary.org/wiki/sourd_comme_un_pot

sourdement : https://fr.wiktionary.org/wiki/sourdement

tomber dans l’oreille d’un sourd : https://fr.wiktionary.org/wiki/tomber_dans_l%E2%80%99oreille_d%E2%80%99un_sourd

L’oreille

Dormir sur ses deux oreilles : ne pas être inquiété par quelque chose

Prêter l’oreille à quelqu’un ou quelque chose : écouter avec attention quelqu’un ou quelque chose

Tendre l’oreille : écouter avec beaucoup de concentration, quand les circonstances n’aident pas à distinguer les sons

Mettre la puce à l’oreille de quelqu’un : éveiller la curiosité de quelqu’un, l’intriguer

Cela lui entre par une oreille et ressort par l’autre : quand une personne ne prête aucune attention à ce qui est dit

Avoir l’oreille qui traîne : écouter de façon indiscrète ce qui est destiné à d’autres

Casser les oreilles à quelqu’un : importuner quelqu’un par des paroles ou l’assourdir avec un bruit excessif

Chauffer ou échauffer les oreilles à quelqu’un : énerver quelqu’un

Tirer les oreilles à quelqu’un : réprimander quelqu’un

Ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd : quand on met à profit ce qui a été dit

Être dur d’oreille ou de la feuille : être un peu sourd

Faire la sourde oreille : faire semblant de ne pas entendre

Trésor de la Langue Française informatisé

TLFi | Trésor de la Langue Française informatisé

SOURD, SOURDE, adj.
A.  [En parlant de qqn, d’un être animé]
1. a) Qui est privé du sens de l’ouïe ou qui est atteint d’une baisse (unilatérale ou bilatérale) de l’audition qui empêche d’entendre certains sons. Synon. mal-entendant, dur d’oreille*, sourdingue (pop.). Être sourd de naissance; être complètement, légèrement, à moitié, un peu, au trois quarts sourd; enfant, femme, homme sourd(e); animal, chien, chat sourdIl est très vieux. Devenu sourd à demi et aveugle, boiteux, édenté, perclus presque, il se traîne au coin du feu les jours froids, au soleil par les beaux jours (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 159). Chez le sujet qui entend, l’absence de sons ne rompt pas la communication avec le monde sonore, de même chez un sujet sourd et aveugle de naissance, l’absence du monde visuel et du monde auditif ne rompt pas la communication avec le monde en général (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 379).
Être sourd comme un pot, comme une pioche… (fam.). Être complètement sourd, ne rien entendre. Thérèse est sourde comme un sac de charbon et lente comme la justice. Les ans en sont la cause. Le pis est qu’elle croit avoir ouïe fine et bon pied (FRANCE, Bonnard, 1881, p. 378):

1. Rien n’est douloureux comme le penchement de la jeune femme de Loti, cherchant à entendre ce que dit Daudet. Car elle est sourde comme un pot, la jeune femme, et s’efforce à percevoir ce qui se dit avec le soulèvement de ses paupières, la tension de son petit nez, le happement de sa lèvre supérieure…
GONCOURT, Journal, 1892, p. 223.

 Il vaut mieux entendre ça/cela que d’être sourd. [Pour marquer sa réprobation à, son désaccord avec des propos jugés déraisonnables, ineptes ou choquants] Le gaullisme peut être un régime anticapitaliste si des hommes de gauche en prennent les commandes. Il vaut mieux entendre ça que d’être sourd, dit Henri; mais c’est tout juste! (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 459).
Je ne suis pas sourd/sourde. [Adressé à qqn qui parle trop fort, ou qui se répète] Votre mère vous appelle, lui dit Wallner. Après un instant:  Encore!… L’entendez-vous?  Mais oui, je ne suis pas sourde! (REIDER, Mlle Vallantin, 1862, p. 102).
Êtes-vous sourd/sourde; tu es sourd/sourde. [Pour attirer l’attention de qqn qui feint de ne pas entendre, de ne pas comprendre ce qui vient d’être dit; adressé à qqn qui réagit lentement à des propos, à un ordre, à l’appel, etc.] Eh bien, mon ami, tu es donc sourd? Depuis une heure, je fais le signal convenu, et tu ne réponds pas (DUMAS père, Demois. St-Cyr, 1843, IV, 16, p. 193). Vous n’entendez donc pas?… Êtes-vous sourde?… Voilà trois heures que je sonne (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 75).
 Empl. subst. Un môme parlait à un sourd; après avoir essayé de se faire entendre en lui criant alternativement à chacune de ses oreilles, il s’est mis à la fin, et de désespoir, à lui hurler dans le derrière (FLAUB., Corresp., 1849, p. 122). Pour ce sourd total, comme la perte d’un sens ajoute autant de beauté au monde que ne fait son acquisition, c’est avec délices qu’il se promène maintenant sur une terre presque édénique où le son n’a pas encore été créé (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 77).
Crier, taper, frapper, verbe d’action + comme un sourd. Très fort, avec une extrême violence. On vivait dans une vraie tornade. Dès que ça mugissait en tempête, ils gueulaient les mômes comme des sourds, ils s’entendaient plus (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 267). On ne savait plus où l’on était. Le lieutenant fonçait comme un sourd dans la nuit noire, appuyant toujours à droite (CENDRARS, Main coupée, 1946, p. 58).
[À propos d’une pers. avec qui il est impossible de discuter, qui ne tient aucun compte de ce qui est dit] Autant parler à un sourd, c’est comme si on parlait à un sourdParler pour les sourds. Parler sans être écouté, en pure perte. C’est bon, je vous dis, ça suffit. (…) Je vous répète (…) que je n’ai pas l’habitude de parler pour les sourds (COURTELINE, Conv. Alceste, Mentons bleus, 1906, p. 184).
Ne pas tomber dans l’oreille d’un sourd. [En parlant d’un conseil, d’un avertissement, d’un propos quelconque] Être pris en considération par quelqu’un qui est décidé à en faire son profit, à en tirer parti. Le diable m’emporte: c’est trop beau! (…) On ne peut plus avoir qu’un désir, après: mourir. Ces paroles ne tombaient point dans l’oreille d’un sourd. Au lieu d’en sourire (…) il se hâtait, après l’avoir quitté, de les colporter partout (ROLLAND, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 402).
Faire le sourd. Synon. faire la sourde oreille (infra c).
Dialoguede sourds.
ProverbeIl n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Il est impossible de faire entendre raison à celui qui refuse de comprendre les arguments exposés. Nos Cicérons, avec toute leur éloquence, n’ont guère persuadé que ceux qui, avant de les entendre, étaient de leur avis. Je sais la raison qu’on en donne: ventre n’a point d’oreilles, et il n’est pire sourd… (COURIER, Pamphlets pol., Au réd. « Censeur », 1820, p. 40). La princesse de Taormina, sourde jusque-là, car il n’est pires sourdes que celles qui ont des oreilles pour ne pas entendre, la princesse de Taormina, devant l’évidence (…) a compris que c’était de la musique et qu’on ne jouait pas au poker (PROUST, Prisonn., 1922, p. 287).
b) MÉD. Qui est atteint de surdité. Un individu est considéré comme sourd lorsque son acuité auditive est inférieure à 70 décibels (Méd. Biol. t. 3 1972). Avant l’âge de cinq ans, l’enfant très sourd, au-delà de 50 db, ne parlant pas ou parlant peu devra être pris en charge par un organisme compétent où une éducation de la parole sera entreprise (Lar. Méd. t. 3 1972, p. 318).
 Empl. subst. Sourd léger, total; demi-sourd grave, légerLe sourd congénital n’acquiert pas le langage des autres hommes, c’est-à-dire qu’il n’acquiert pas la capacité d’utiliser les signes de la langue (H. HECAEN, R. ANGEVERGUES, Pathol. du lang., 1965, p. 17).
c) [P. méton.Oreille(s) sourde(s). Oreille(s) qui ne permet(tent) plus une audition normale.
Faire la sourde oreille; faire sourde oreille (vx). Faire semblant de ne pas entendre ce qui est dit, d’ignorer des propos; refuser d’accéder à une demande. Synon. faire le sourdIl crut à plusieurs reprises qu’on prononçait son nom. Peut-être même l’appelait-on. Il aimait mieux, en tout cas, faire la sourde oreille (GREEN, Moïra, 1950, p. 198).
d) Régional
) Subst. masc. Salamandre terrestre. Nous savons par Victor Hugo raconté, chap. VII, qu’il cherchait des sourds dans le jardin des Feuillantines (ESN. 1907).
) Adj. et subst. fém. (Bécassine) sourde. Petite bécasse qui hiverne en France. Et le petit, ramassant une bécassine, disait (…)  C’est une sourde. On appelle ainsi les petites qui ne crient pas en s’envolant (VIALAR, Homme de chasse, 1961, p. 278).
2. Qui dans certaines conditions ne peut entendre, qui est privé momentanément du sens de l’ouïe. [Paulinene s’apercevait pas de sa présence. Aucune parole ne touchait cet être sourd, aveuglé, inabordable, tout frémissant dans une tourmente solitaire (CHARDONNE, Dest. sent., II, 1934, p. 220). On m’a dit beaucoup de choses que je n’ai pas pu entendre, mais dès que j’entre dans un salon, il me semble que je deviens sourd et que ma vue se brouille (GREEN, Journal, 1946, p. 16).
3. Au fig. Qui reste insensible à certaines réalités, qui refuse de reconnaître des faits. On ne raisonne pas (…) les passions. Les gens passionnés sont sourds comme ils sont aveugles (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 359). Il est impossible à une victime des camps de concentration d’expliquer à ceux qui l’avilissent qu’ils ne doivent pas le faire. C’est que ces derniers ne représentent plus des hommes, mais une idée, portée à la température de la plus inflexible des volontés. Celui qui veut dominer est sourd (CAMUS, Actuelles I, 1948, p. 259).
Empl. subst. [Baudelairey est demeuré [dans le monde réeljusqu’à la fin, alors qu’après lui Rimbaud n’y persévéra pas au-delà de sa dix-neuvième année, et puis il rallia le troupeau des aveugles et des sourds (MAURIAC, Mém. intér., 1959, p. 48).
 Sourd à qqc., à qqn (rare). Qui est insensible à, qui refuse de comprendre, de tenir compte de quelque chose, de quelqu’un. Ma main dans ta crinière lourde Sèmera le rubis, la perle et le saphir, Afin qu’à mon désir tu ne sois jamais sourde! (BAUDEL., Fl. du Mal, 1859, p. 42). Voilà donc cette jeunesse [étudiantesourde, aveugle à ce qui se faisait, à ce qui se fait, à ce qui va se faire. Que lui reste-t-il? Un désordre. Un hiatus qu’elle bouche en organisant des monômes, en promenant des pancartes (COCTEAU, Diff. d’être, 1947, p. 192).
SYNT. Sourd à la vérité; sourd au destin; sourd aux avertissements, aux conseils, aux excuses, aux exhortations, aux injures, aux menaces, aux moqueries, aux prières, aux promesses, aux rumeurs.
B.  [Avant ou après le subst.]
1. a) [En parlant d’un son, d’un phénomène sonore] Qui n’est pas entendu distinctement, dont la résonance est atténuée, étouffée; peu sonore. Synon. amorti, assourdi, étouffé, mat, voilé (part. passé de voiler1). Par la fenêtre ouverte où grimpaient, en guise de jalousies, des capucines et des volubilis, on entendait le bourdonnement sourd des mouches à miel dans les banquettes de balsamines (THEURIET, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 110). [L’idéeempruntait, pour le frapper au vif de sa détresse, le plus furtif craquement derrière lui ou le plus sourd écho, dans le mur de la rue, de talons arpentant les trottoirs (CARCO, Homme traqué, 1922, p. 26). De la rue du château, le sous-préfet entendit un bruit sourd fait de mille bruits, pareil à celui qui se lève dans les bois avant l’orage (POURRAT, Gaspard, 1930, p. 82).
 [P. méton.] Qui émet un son assourdi, n’ayant que peu de résonance. Il explore d’un seul coup d’archet les plus secrètes profondeurs de ces boîtes harmonieuses: le premier violon est sourd, le deuxième aigre (FRANCE, Servien, 1882, p. 141).
Lime* sourde.
Pédale sourde (d’un piano). Synon. de sourdine A 1.
 PHONÉT. Consonne sourde ou, absol., sourde, subst. fém. Consonne dont l’articulation ne comporte pas de vibrations glottales. Synon. (consonne) non voisée, continue, occlusive, vibrante sourdeCependant la sourde n’est pas impossible; elle existe même en français, où un L suivant une sourde sera prononcé sans le son laryngé (par exemple dans pluie, par opposition à bleu) (SAUSS. 1916, p. 74). La comparaison du p de pou et du b de bout par exemple laisse supposer que la distinction du caractère « sourd » et du caractère « sonore » (…) permet d’opposer entre eux deux phonèmes (Langage, 1968, p. 197).
SYNT. Battement, bruissement, chant, choc, coup, cri, gémissement, grognement, murmure, râle, son sourd; détonation, exclamation, explosion, plainte, paroles, rumeurs, sonorité sourde(s).
b) [En parlant d’un lieu, d’un milieu (aérien, liquide, etc.)] Qui atténue la résonance des sons; qui étouffe, atténue les sons, les bruits. Une oraison funèbre prononcée d’une voix frêle dans un local complétement sourd ne fut pas entendue de vingt personnes (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 445). Au bout de l’allée s’ouvraient les champs. Mais ils étaient noirs, muets. J’avoue que j’éprouvai, moi aussi, un léger malaise. Pas une étoile. Un ciel sourd, fermé. Aucun frémissement d’insecte (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 63).
2. P. anal. [En parlant d’une sensation visuelle ou olfactive] Qui n’est pas vif, qui manque de force, qui n’est pas appuyé. Coloration, couleur, lueur, reflet, tonalité sourd(e)Des bouffées de vent chaud leur soufflaient au visage l’haleine des jardins qu’ils longeaient, un fumet de terreau mouillé, une odeur sourde de fleurs au soleil, d’œillets d’Inde, d’héliotropes (MARTIN DU G., Thib., Belle sais., 1923, p. 926). Parmi les maîtres d’autrefois, Daumier s’apparente surtout par son modelé vigoureux, par sa prédilection pour les tons chauds et sourds à Rembrandt et à Goya (RÉAU, Art romant., 1930, p. 101).
[En parlant d’une couleur] Qui est peu éclatante, mate. Sur le cou blanc, la morsure paraissait d’un brun sourd et puissant (ZOLA, Th. Raquin, 1867, p. 81). La chambre de Mme Pauque (…) tendue d’un gris sourd qui tournait au mauve, avec des rideaux de velours violet (GREEN, Malfaiteur, 1955, p. 224).
[P. méton.Un riche paysage, étouffé et sourd, avec des tons de velours fauve, sert de fond à cette voluptueuse scène mythologique (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p. 38).
Lanterne* sourde.
JOAILL. Pierre sourde. Pierre précieuse qui manque d’éclat et de brillant. (Dict. XIXe et XXe s.).
C.  Au fig. [Avant ou après le subst.]
1. Qui ne se manifeste pas nettement, qui n’apparaît pas clairement à la conscience. Synon. indistinct, insaisissable, latent, secret1, vague1Ambition, colère, haine, jalousie, peur, rage, tristesse sourdeIl y a en elle une telle fatuité exaspérée, comme une suprême fureur de plaire, de conquérir, d’être aimée, fouettée par un sourd désespoir de vieillir (GONCOURT, Journal, 1862, p. 1159). Il entretient en filigrane de l’assurance consciente une angoisse sourde, qui se traduit par des peurs irraisonnées et localisées au hasard, par des superstitions (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 280).
2. a) Qui ne se manifeste pas nettement par des actes, qui s’effectue de manière insidieuse. Synon. caché, secretSon cœur [d’Henrietterestait meurtri; et, s’il y entrait un soulagement, une tendresse nouvelle, ce ne pouvait être qu’à son insu: tout un de ces sourds cheminements de la graine qui germe, sans que rien, au regard, révèle le travail caché (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 511):

2. À quoi tient chez moi cette résignation, je ne nie pas qu’elle puisse être en partie alimentée par l’élément même de tragique qui sourdement y circule: je crois que j’ai besoin du tragique sourd dans la mesure même où je n’aime pas spontanément le tragique extériorisé: ceci assez proche de ma volonté (…) de réprimer les gestes, de réduire le geste à l’extrême minimum…
DU BOS, Journal, 1924, p. 31.

 MAR. Lame sourde. Lame qui apparaît soudainement sans qu’on ait pu la prévoir, sans qu’on ait senti le vent se lever. De petites embarcations peuvent y naviguer [dans la baie], mais il faut que ce soit avec prudence, car la houle y est souvent très forte, et les lames sourdes fort dangereuses (FREYCINET, Voy. terres austr., 1815, p. 189).
b) Qui est volontairement caché. Guerre, lutte, machination sourdeIl n’y a pas d’énigme chez moi, madame. Ma conduite est sans arrière-pensée (…) ma vie est transparente, sans menées sourdes; je ne cherche à humilier, ni à calomnier personne (BALZAC, Éc. mén., 1839, I, 6, p. 372). C’était une mère affectueuse et douce, toujours en révolte sourde contre la sévérité du père à l’égard de ses enfants (AYMÉ, Jument, 1933, p. 37).
REM. Sourdaud, -aude, subst. et adj., vx, région. (Personne) qui entend mal. Avec son regard austère, sa surdité affligeante et son air bonhomme, Chaudrut n’était ni plus ni moins qu’une sacrée canaille! (…) ce sourdaud, terreur des mastroquets qui s’écroulent sous le crédit, papillonnait (…) roucoulait, se pavanait (HUYSMANS, Sœurs Vatard, 1879, p. 58). Il ne s’effarouchait même pas des effarouchées, telle cette dame Garneau à qui il parlait toujours fort. « Que voulez-vous, disait-il, je suis sourdaud » (J. FERRON, Le Saint-Elias, 1972, p. 174 ds Richesses Québec 1982).
Prononc. et Orth.: , fém. Homon., formes de sourdre. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. En parlant d’êtres animés 1. ca 1050 surz « qui n’entend pas, par défaut de l’ouïe » (Alexis, éd. Chr. Storey, 551); ca 1140 les surz (GEFFREI GAIMAR, Histoire des Anglais, éd. A. Bell, 1320); 1579 es-tu sourde? (LARIVEY, Esprit, IV, 6 ds IGLF); 1680, 29 mars frapper comme un sourd (Mme DE SÉVIGNÉ, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 887); 1690 crier comme un sourd (FUR.); 1763, 21 févr. sourd comme un pot (VOLTAIRE, Lett. d’Argental ds LITTRÉ); 2. a) 1204 « qui, bien qu’entendant correctement se comporte comme une personne qui a perdu l’ouïe » (RENCLUS DE MOLIENS, Carité, éd. A.-G. Van Hamel, LX, 5: Ki les orras se tu ies sours?); b) loc. ca 1175 faire la sorde oreille (BENOÎT, Chronique des Ducs de Normandie, 23784 ds T.-L.); fin XIIIe-déb. XIVe s. faire le sourt (Des Braies au Cordelier, 127, éd. Barbazan et Méon, t. 3, p. 173); 1549 faire le sourd a aucun (EST.); 1556 (RONSARD, Nouv. Continuation des Amours, éd. P. Laumonier, VII, 60: tu es sourde à mes cris). B. En parlant de choses 1. 1314 se dit d’outils qui ne font pas de bruit quand on s’en sert tenailles sourdes (HENRI DE MONDEVILLE, Chirurgie, éd. Ch. Bos, 607-608); mil. XVe s. lyme sourde, ici fig. « femme hypocrite, à l’image de certaines limes qui ne font pas de bruit » (Ch. D’ORLÉANS, Rondeaux, 146, 1, éd. P. Champion, p. 374); 2. a) ca 1520 « qui est peu prononcé, qui ne se manifeste pas nettement » emorroïdes sourdes (J. FALCON, Le Guidon en françois, f o 244 ds SIGURS, p. 450); b) 1601 se dit de sentiments dépourvus d’acuité » sourde rage (MONTCHRESTIEN, Aman, p. 247 ds IGLF); 3. 1558 « peu sonore; dont le son est étouffé » (EST. MÉDICIS, Chron., I, 478 ds GDF. Compl.); d’où) 1768 mus. syllabes sourdes (ROUSSEAU t. I, p. 328; t. II, p. 47)) 1842 ling. consonnes sourdes (Ac. Compl.); 4. 1559 « qui s’accomplit dans l’ombre sans qu’on en ait clairement conscience » (AMYOT, P. Aem., 28 ds LITTRÉ: Et courut incontinent un bruit sourd parmy le peuple, que ce signe celeste signifioit l’eclipse du roy); 5. 1602 « qui s’effectue d’une manière insidieuse » pratiques sourdes (PASQUIER, Les Recherches de la France, 392 ds IGLF); 6. 1611 math. nombre sourd (COTGR.); 7. a) 1622 « terne, sans éclat » esmeraude sourde (E. BINET, Merv. de Nat., p. 187 ds GDF. Compl.); b) 1678 « qui n’est pas vif » (en parlant d’une couleur) (BOSSE, Manière de graver, 75 ds IGLF: cette façon de graver produit aussi des tons gris et sourds). Du lat. surdus « qui n’entend pas »; « qui ne veut pas entendre; insensible ». Fréq. abs. littér.: 4 476. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 4 460, b) 8 327; XXe s.: a) 8 142, b) 5 870.
DÉR. 1. Sourdière, subst. fém. Volet en bois matelassé placé à l’intérieur d’une baie. (Dict. XIXe et XXe s.). Synon. sourdine.  1re attest. 1872 (LITTRÉ); de sourd, suff. -ière*. 2. Sourdité, subst. fém., ling., phonét. Caractère d’un phonème sourd. En appos. Chaque trait est partagé par plusieurs phonèmes: p partage avec b le trait bilabial, s’oppose à lui par le trait sourdité (Langage, 1968, p. 199). 1res attest. a) 1478 surdite (N. PANIS, Trad. de la chirurgie de Gui de Chauliac, f o 198 ds SIGURS, p. 419), 1520 sourdite (N. FALCON, Le Guidon en françois, 285dibid.), b) 1924 ling. (Lang. Monde, p. XI); dér. sav. de sourd, suff. -ité* (cf. le lat. surditas).
BBG.  Archit. 1972, p. 229 (s.v. sourdière).  CALBRIS (G.). « Sourd » est sonore; « sonore » est sourd. Ét. Ling. appl. 1974, n o 14, pp. 87-95.  DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 28. LEWICKA (H.). Dat. de mots. Kwart. neofilol. 1954, t. 1, p. 78. – SAIN. Arg. 1972 [1907] p. 20, 209.

SOURD-MUET, SOURDE-MUETTE, adj. et subst.
(Celui, celle qui est) atteint d’une surdité (congénitale ou précoce) entraînant une mutité sans qu’il y ait de malformation de l’appareil phonatoire. Enfant sourd-muet; école publique de sourds-muets; rééducation des sourds-muets; alphabet, langage des sourds-muetsLes sourds-muets pensent par images et parlent par gestes. Les mots qu’on leur transmet, arrivent à leur esprit par les yeux (…) et sont pour eux une image (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 250). Un sourd-muet, comme son nom l’indique souffre de deux déficiences: il ne peut entendre et ne parle pas. La surdité est le fait premier, fondamental; le mutisme n’est que la conséquence (P. OLÉRON, Les Sourds-muets, 1950, p. 7).
Prononc. et Orth.: fém. Parfois (MARTINET-WALTER 1973). Att. ds Ac. dep. 1878. Plur. sourds-muetsÉtymol. et Hist. [1564 d’apr. BL.-W., sans réf.] 1585 enfans sourds et muets (A. PARÉ, XVI, 60, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 601); 1791 sourds-muets (Décret du 21 juillet ds DG). Comp. de sourd* et de muet*Fréq. abs. littér.: 128. Bbg. GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l’adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tremsø, 1972, pp. 81-83; 181-182.

Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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SOURD, adj. et subst.
[T-L : sort2 ; GDC : sourt ; DÉCT : sort2 ; FEW XII, 452a : surdus ; TLF : XV, 778b : sourd]

A. –

[D’une pers. (des oreilles)]

1.

« Qui entend mal ou qui n’entend pas du tout«  : Pas si sourt ne suis que bien n’oye Ce qu’entre vous deux avez dit. (Mir. ev. arced., c.1341, 127). Quant sa gent einsi le veïrent, Isnelement avant saillirent, Dont chascuns forment l’agrapa ; Mais par force leur eschapa. Aval la ville s’en fuï ; Il devint sours et amuï ; Car dès lors qu’il parti de la, Ainc puis de bouche ne parla Parole qu’entendre peüst Homs vivans, tant le congneüst (MACH., J. R. Nav., 1349, 215). Vous pouvez oïr leurs tabours : Qui ne les oit, il est bien sours. Et jà sont descendus aval Pluseurs à piet et à cheval ; Et li autre gardent le pas Pour ytant qu’il ne vuelent pas Que nuls puisse monter amont. (MACH., P. Alex., p.1369, 151). Et se les estoilles estoient meues par elles en la multitude ou parmi la multitude de l’aer qui est espandu partout lasus ou du feu, si comme touz dient qui ne mettent le ciel d’autre nature que les elemens, il convendroit par neccessité que elles feissent son qui passast la force et la grandeur naturelle de tout autre son. Et se ainsi estoit, il convendroit que ce son attainist siques ici et que il destruisist tout et nous feist tous sourz. (ORESME, C.M., c.1377, 474). …une bonne femme sourde, encienne et de petit gouvernement (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1388, 574). Et quant le roy des Bretons appercoit que nulz ne respond mot a celle querelle, si a dit tout hault : Jossellin, Jossellin, estes vous sours ? Je voy bien que le proverbe que on dit est vray, que vieux pechié fait la vergoingne nouvelle. Cil chevalier estrange vous porte une moult estrange medicine. Advisez vous de respondre, car il vous est bien besoing. (ARRAS, c.1392-1393, 59). Gens aveuglez, gens sourdz, mutz, insensibles… (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 2). Quant ung cerveau est refroidé Les humeurs a cop s’en descendent Tant que les oyes sourdes rendent. (Exc., Science A.R., c.1465-1468, 44). MATHATIEL. Tout est en point. Estes vous sourt, bon gre ma vie ? Ne congnois en nostre juifrie Si terrible homme que vous estes. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 82).

Sourd comme une busche : …mais sourd comme une buche Suis devenu (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 14).

Empl. subst. « Celui qui entend mal ou qui n’entend pas du tout«  : En quele lu les contraitz furent redressez, les vougles ressurent lour veue, et les sourdes le oye (Chron. London A., c.1350, 46). Aucune fois [les miracles se font] en choses sensibles, comme en l’asne de Balaam, qui parla. Aucune fois en creature raisonnable, comme en faisant ambuler et aler droit les boisteux, ouir les sours, susciter les mors et l’enfantement de la vierge Marie. (Somme abr., c.1477-1481, 163). LE JUIF. (…) Ce Nicolas si fait merveilles. (…) Aux sours il refait les oreilles, Contrefaictz il fait droit aller, Aveugles veoir cler, Parler les muetz, Tous maulx met au cler. Qui luy fait regretz, Autant loings que pres, Donne ces soulas. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 79).

Sourd et muet : Et cilz qui ne l’oit ne entent, ne lui respond mot. Et celle, comme courroucie, lui redist autre foiz : Comment, dist-elle, sire musars, estes vous si despiteux que vous ne me daigniez respondre ? Et cilz ne lui respond mot : Par foy, dist-elle, je croy que cilz jeunes homs dort sur son cheval, ou il est sours et muet. Mais je croy que je le feray ja parler, se il oncques parla nul jour. (ARRAS, c.1392-1393, 24). Entre les aultres il y avoit ung malade de .XXIIII. ans et troys moys qui estoit aveugle, sourd et muts (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 25). Maistre, mon filz, Qui est demoniacle, sourt et muet, Tes disciples par leur soet N’ont peu guarir a ma requeste. (Pass. Auv., 1477, 162).

.

Empl. subst. : Tiercement note que sourd de nature sont mueaux, car parolle est en nous par acquisicion et pour ce dit on que l’oye, c’est la porte de l’entendement (GORDON, Prat., c.1450-1500, III, 9). Le pere du sourt et muet demoniacle. (Pass. Auv., 1477, 157). Le muet sourt demoniacle. (Pass. Auv., 1477, 158).

Rem. Réf. à la guérison miraculeuse par Jésus d’un enfant sourd-muet possédé par le démon (Marc 9, 14-29).

Prov. À un sourd ne faut point deux messes. V. messe

2.

« Qui ne veut pas entendre«  : J’ay alheurs paraboles mis, Lesqueulx voyans aveugles sont, Et en ouyant sourtz deviendront. [Réf. à Luc 8, 10] (Pass. Auv., 1477, 137). Qui mieulx entent est le plus sourd. (Rapp., c.1480, 68).

Avoir les oreilles sourdes. « Se comporter comme une personne qui est sourde«  : Sire, m’avés vous entendu ? Vous ai je bien raison rendu Dou corbel et de la corneille ? Se Dieus me gart, trop me merveille Comment vous creés teles bourdes. Avoir devez oreilles sourdes Envers tous ceulz qui vous raportent Teles paroles et enhortent ; Et c’est pechié contre noblesce De croire chose qui tant blesce, Qu’on en pert l’onneur et la vie Et l’amour de sa douce amie. Se vous les volés croire ainsi, Vo dame occirrés de soussy ; Et puis vous en repentirés Et cent fois encor maudirés La journee et ceulz qui le dirent Et les oreilles qui l’oïrent, Le lieu, le damage et la perte Qu’evident sera et apperte (MACH., Voir, 1364, 706).

.

Faire la sourde oreille. « Ne pas vouloir écouter ou faire ce qu’on demande«  : …et toutesfoiz il sembla que le monde et par espicial les crestiens catholiques, facent la sourde oreille et soyent ennuyez de blanc pain. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 97). Mais tantost comme il [le Saint-Esprit] y quiert entrer, que fait Obeissance ? Elle fait la sourde oreille a la vois du Saint Esperit, ou elle est si endormie qu’elle n’oït goute (GERS., Pent., p.1389, 76). …ceulz ne monstrent que iceulz ayent grant cure ou memoire de leurs amis ne de leur delivrance, qui leur font aynsi la sourde oreille, qui leur tournent le dos de la pensee comme s’ilz les contredaignassent. (GERS., Déf., 1400, 226). …à toutes celles remonstrances faisoient comme la sourde oreille (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.5, c.1444-1453, 254).

Faire le sourd. « Faire semblant de ne pas entendre«  : SATHAN. (…) Si te pri que sanz attendue Ne vueilles plus cy demourer, Mais avec moy sanz sejourner, Filz, t’en retournes. BEELZEBUZ. Fait il le sourt, ou il est mournes ? (Mir. st Guill., c.1347, 44). Madame, pour le veoir clerement viz a viz ne voult pas estre la plus courtoise, mais en fist le sourt. (LA SALE, J.S., 1456, 140). Et, dea, voicy trop bon [l]ourdin ; Il fait le sourt. Et, vien ça, dy : Ne te vis je pas ou jardin Avec luy quant il fut saisy ? (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 732). …parquoy comme gens estonnez et surpris pour chose qu’on sceust dire ne faire, parler ne voulurent, mais firent les sours, tellement qu’il convint rompre les portes de la dicte tour, et entra on dedens par force ; au moyen de quoy les ditz paillars furent tous tuez, et par leur faulte. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 293). De par le conseil de la Court Escoutez sans faire le sourt (Myst. st Martin K., a.1500, 210).

.

Faire le sourd des oreilles : …le dit duc cria aprés le roy pour esre delivrez de ce peril (…). Mais le roy (…) fist le sourd des oreilles (FROISS., Chron.[Livre IV] V., c.1400, 711).

.

Faire le sourd à qqn. « Refuser de se laisser convaincre par qqn«  : Y aller [à Orléans] n’est pas peu de chose, S’i nous veullent faire le sourt, Y pourroit avoir du secour(s) Qui nous donneroit resistence. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 126). Elle est venue a Baudricourt, Capitaine de Vaucouleur, Et plusieurs foiz luy fist le sourt, Cuidant luy oster son erreur (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 373).

Avoir qqn à sourd. « Faire la sourde oreille à qqn » : Esse che que tu as songié, Que de m’avoir ainsi assours [l. a s(s)ours, à sours] ? (…) On doibt bien tel homme aloser Qui dort et fait la sour[de] orielle Quand son proffict l’en lui conseille [!] (Bien avisé Mal avisé B., c.1487-1490 [1396], 58).

3.

Au fig. « Qui ignore, qui veut ignorer qqc. » : …c’est le malveis coer de moy, q’est sours et recetterez de touz les mals de mounde (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 222). Trop est sourde l’ame qui ne s’esveille a tel tonnoirre, a tel son d’en hault qui esmuet tout le lieu ou nous sommes sa jus. (GERS., Pent., p.1389, 79). …faictes mectre en sourde ouibliance toute plaisance passée (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 150).

Par sourde oreille. « En ignorant qqc. » : Il te convient aussi passer moult de choses par sourde oreille et que tu penses plus a ce qui touche ta paix. (Internele consol. P., 1447, 195).

Sourd à : Car pour verité, dist il, celui silence si obstiné et les ieux enclinez en terre et les oreilles sourdes a touz soulas et la vergoingne de regarder la lumiere sont demonstrances et signes d’un grans fais de menaces qui ist et sourt de tres parfont courage. (BERS., I, 9, c.1354-1359, 7.3, 11).

Ne pas estre sourd de + inf. « Ne pas manquer de » : SAINCT MARTIN. Mon povre cueur vers vous acourt Pour mon cas au long vous compter. SAINCT HILLAIRE. Dictes donct ; pas ne seray sourt, Mon amy, de vous escouter. (LA VIGNE, S.M., 1496, 258).

B. –

[D’une chose]

1.

« Dont le bruit est étouffé, qui s’entend peu« 

[De la mer] « Au bruit étouffé » : [Polyphème à Galatée] Plus crueus d’ourse faonnee ; Plus desloial d’isdre foulee, Et plus tourble de sourde mer Se tu ne me daignes amer (MACH., Voir, 1364, 632).

[D’un instrument de musique] « Qui émet un son assourdi, n’ayant que peu de résonance » : Silete d’instrumens sours ou secret. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 215).

[D’un outil] « Qui ne fait que peu de bruit quand on s’en sert«  : Il me semble que, quant nous nous yrons mettre ou fumyer, qu’il sera bon que je y aille avec une lyme sourde, qui soit emmanchée de plomb, pour sayer ceste barrière. (BUEIL, I, 1461-1466, 131). …mais l’oppinion dudit bastard et de Harmes estoit qu’il failloit avoir des lymes sourdes pour lymer cinq ou six barreaulx du treilliz de fer d’une fenestre. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 168).

Rem. MONDEVILLE ds TLF (tenailles sourdes).

.

[P. compar. ou p. métaph.] Lime sourde : La veez vous la, la lyme sourde, Qui pense plus qu’elle ne dit ? (CH. D’ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 374). Ancores ont telz faulz conseilliers ces qualitez par lesqueles on les peut facilement congnoistre que ilz sont, en leurs faiz, couvers, caulz et malicieux, taciturnes comme une lime sourde, haultains et enflez d’orgeul, sans equité et sans pité. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 160).

Coup sourd. « Coup qui s’entend peu, qui est donné d’estoc«  : …et luy baillèrent plusieurs coups orbes et sourds (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.3, c.1437-1464, 123).

2.

Au fig. « Qui ne se manifeste pas ouvertement«  : Et manda de recief gens en Brabant, Flandres, Haynnaut, Picardie, Namur et par tous ses pays, et fut adverty que, par l’ayde du Roy de France, qui tousjours luy faisoit sourde guerre, le duc de Loraine estoit rentré en son pays de Loraine et avoit legierement reconcquis tout le pays (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 141).

3.

MÉD. « Qui ne se manifeste pas par un écoulement«  : En corps qui avoient egestions de fiel, et sourdece vient aprez, tel flux cesse ; et se aucuns corps sont sours, et que telles agestions survienent, telle sourdece si faut et cesse. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 74).

Hemorroïdes sourdes et aveugles. « Hémorroïdes sans écoulement«  : …aprez les unes apperent dehors, et les autres non (lees), les unes sont sourdes, qui ne gectent riens, et les autres gectent (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 162). …et toutevoiz il a esté devant dit en exposant l’amphorisme, car il est aucunes emorrides sourdes et adveugles dont il ne court neant ; pourquoy il semble que Gallien faille. (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 163).

C. –

MATH. Proportion sourde. « Proportion qui est fondée sur un nombre irrationnel«  : …si comme il appert en geometrie des proporcions qui sont entre choses incommensurables, et sont appelees irracioneles ou sourdes. (ORESME, E.A.C., c.1370, 285). Et pour ce est elle appellee aussi proporcion sourde et irraisonable, et aussi sont generalment toutes celles qui ne pevent estre trouvees entre quelconques nombres, pour ce que nul quelconques nombre ne nulle quantité commune a toutes deux ne les peut mesurer precisement. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 185-186). Finablement, on trouvera qu’il est tousdiz ainsy, en toutes autres figures regulieres et semblables ensamble et en toutes proporcions aussi, soient sourdes ou non, maiz j’ay mis mon exemple en la figure quaree et en la cubique, et en proporcion aussi tres raisonable, pour mielx la chose entendre. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 187).

Rem. FEW XII, 453a : «Nfr. sourd « irrationnel, incommensurable (nombre, etc.) » (Cotgr 1611 – Besch 1858)».

Famille de surdus

ASSOURDER, verbe
ASSOURDIR, verbe
BESSOURDÉ, adj.
ESSOURDER, verbe
ESSOURDIR, verbe
SORDEGNE, subst. fém.
SORNE1, subst. fém.
SORNE2, subst. fém.
SORNER, verbe
SORNERIE, subst. fém.
SORNET, subst. masc.
SORNETTE, subst. fém.
SORNILLER, verbe
SORNU, adj.
SOURD1, adj. et subst.
SOURD2, subst. masc.
SOURDÂTRE, adj.
SOURDAUD, subst. masc.
SOURDEMENT1, adv.
SOURDER1, verbe
SOURDESSE, subst. fém.
SOURD-MUET, adj. et subst. masc.
SURDITÉ, subst. fém.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dictionnaire étymologique et historique du galloroman (français et dialectes d’oïl, francoprovençal, occitan, gascon)

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